Le 19 juin 2024, la directive (UE) 2024/1640 (AMLD6) du Parlement européen et du Conseil sur les mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier à des fins de BC/FT a été publiée.

Cette nouvelle directive abroge la directive (UE) 2015/849 et réforme profondément les approches réglementaires, en se concentrant désormais uniquement sur les responsabilités spécifiques des États membres, tandis que les obligations du secteur privé sont transférées au Règlement AMLR (en savoir plus sur l’AMLR).

Champ d'application

L’AMLD6 entrera en vigueur le vingtième jour suivant sa publication dans le Journal officiel de l’Union européenne.

Les États membres disposent de trois ans à compter de son entrée en vigueur pour transposer l’AMLD6 dans leur législation nationale

6 AMLD, pourquoi ce nom ?

Une précédente directive européenne (2018/1673), qui réforme le droit pénal concernant le blanchiment de capitaux, a souvent été mentionnée dans les médias et par les professionnels de la conformité sous le nom de « 6AMLD ».

Cependant, la Commission européenne a clarifié que cette directive ne devrait pas être vue comme un outil autonome de lutte contre le blanchiment de capitaux. Au contraire, elle est conçue comme un élément distinct et complémentaire au cadre réglementaire global de l’UE dédié à cette lutte.

Principaux apports de la 6AMLD

Évaluations des Risques (NRA):

La directive impose à la Commission européenne et aux gouvernements nationaux de revoir tous les quatre ans les risques liés au BC/FT.

Ces évaluations doivent être accessibles aux entités réglementées concernées.


Cellules de Renseignement Financier :

La version révisée de la 6AMLD renforce l’autonomie et l’indépendance des cellules de renseignement financier (FIU) en exigeant qu’elles disposent de ressources financières, humaines, et techniques adéquates.

Pour augmenter la transparence, les FIU doivent fournir des retours sur les rapports d’activités suspectes et publier des rapports annuels sur les tendances de déclaration. Elles doivent également partager ces informations avec d’autres entités publiques engagées dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

 

Supervision :

La 6AMLD établit des exigences précises pour divers secteurs financiers, demandant notamment que les bureaux de change, les bureaux d’encaissement de chèques, et les prestataires de services de fiducie ou de société soient dûment agréés ou enregistrés.

Les prestataires de services de jeux d’argent doivent également être réglementés.

Les entreprises offrant des services dans le cadre de la libre circulation des services de l’UE, comme les émetteurs de monnaie électronique, les prestataires de services d’actifs crypto (Crypto Asset Service Providers » – CASPs), et les prestataires de services de paiement, sont tenues de désigner des points de contact centraux pour les autorités de surveillance. En cas d’opérations transfrontalières, c’est le pays d’origine qui a la responsabilité de réguler ces activités.

La 6AMLD précise également les fonctions des autorités de surveillance et détaille le type d’informations de surveillance à fournir aux entités régulées.

Elle souligne aussi la nécessité pour les superviseurs de mener des activités de sensibilisation et de signaler toute suspicion aux cellules de renseignement financier compétentes.

 

Probité des cadres supérieurs et des bénéficiaires effectifs :

La directive 6AMLD instaure des critères de probité stricts pour les cadres supérieurs et les bénéficiaires effectifs des entités régulées.

Elle exige que ces individus soient évalués régulièrement pour s’assurer de leur « honorabilité et compétence », ce qui implique qu’ils doivent démontrer leur honnêteté, intégrité, ainsi que les connaissances et l’expertise nécessaires pour leurs fonctions.

La directive stipule aussi clairement que toute personne reconnue coupable d’infractions pénales liées au BC/FT ou à d’autres infractions pertinentes, ne doit pas occuper de postes de responsabilité ni être bénéficiaire effectif d’une entreprise régulée. En cas de condamnation, ces individus doivent être écartés de leurs fonctions et renoncer à leurs intérêts dans l’entreprise.

En outre, les autorités de surveillance ont le pouvoir d’imposer des interdictions temporaires aux cadres qui ne répondent pas aux exigences d’intégrité et de compétence requises.

 

Sanctions

La directive européenne exige que les États membres mettent en place des sanctions administratives efficaces, proportionnées et dissuasives pour répondre aux violations graves, répétées ou systématiques des règles anti-blanchiment par les entités concernées.

Ces sanctions visent également les individus responsables d’infractions, assurant que la responsabilité personnelle soit engagée.

Les sanctions financières spécifiées incluent le paiement de deux fois le montant de l’avantage tiré de l’infraction ou d’un minimum de 1 million d’euros pour toutes les entités.

Pour les institutions financières ou de crédit, les amendes sont encore plus lourdes, avec des sanctions de 10 millions d’euros ou 10 % du chiffre d’affaires annuel total, selon le montant le plus élevé, et un plafond de 5 millions d’euros pour les personnes physiques.

D’autres mesures correctives peuvent être appliquées, telles que la publication de déclarations publiques détaillant les manquements, des injonctions de cesser et de s’abstenir toute conduite non conforme, le retrait ou la suspension des autorisations, ainsi que l’imposition d’interdictions professionnelles aux cadres supérieurs.

Ces sanctions sont rendues publiques par les autorités de contrôle pour renforcer la transparence et la dissuasion dans le cadre de la LBC/FT.

 

Registres des Bénéficiaires Effectifs:

La directive européenne vise à améliorer la transparence des informations concernant les bénéficiaires effectifs. Selon cette directive, toutes les données inscrites dans les registres doivent être vérifiées par l’entité publique responsable de la gestion du registre ainsi que par les entités obligées de fournir ces informations.

La directive européenne exige des États membres qu’ils mettent en place des mécanismes pour identifier rapidement toute inexactitude ou divergence dans les registres des bénéficiaires effectifs.

Les entités gestionnaires de ces registres sont tenues de corriger les divergences signalées dans un délai de 30 jours, à moins que le problème ne soit complexe et nécessite une enquête plus poussée. Ces entités ont également le pouvoir de mener des enquêtes directes pour clarifier ces inexactitudes et divergences, en se basant sur le risque, et peuvent imposer des sanctions en cas de non-conformité.

La directive ne rend pas obligatoire la totale accessibilité publique de ces registres, mais spécifie quelles informations doivent être disponibles pour le public, les journalistes, et les groupes de la société civile, surtout lorsqu’il existe un intérêt public légitime.

 

Registre des actifs :

Pour renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement des activités criminelles, la 6AMLD recommande l’établissement de registres centraux transfrontaliers et de systèmes de recherche électronique pour les données bancaires et immobilières. Cette initiative vise à simplifier l’identification des titulaires de comptes bancaires, de coffres-forts, et de propriétés immobilières, actuellement compliquée par la fragmentation des données.

 

Protection des lanceurs d’alerte :

Des exigences plus détaillées sont définies, notamment en matière de protection des données personnelles et de protection judiciaire.

 

Traitement des données personnelles :

La directive clarifie la base juridique pour le traitement des données personnelles dans le cadre de la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.

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